Cette semaine, il n’est plus question de comeback ou d’actions de légendes. On remonte au début des années 1960 avec l’histoire d’un joueur à la fois pionnier dans le football, sur la scène médiatique et populaire. Ce joueur c’est Ernie Davis. Un des premiers sportif professionnel noir aux Etats-Unis, mais qui n’a jamais joué au haut-niveau.
Ce nom ne vous dit peut-être rien mais ce running back très doué dès son enfance, issue d’une famille pauvre de Pennsylvanie, s’inscrit dans la lignée d’un Jackie Robinson au Baseball.
Ernie Davis est né en 1939 en Pennsylvanie et vit là-bas pendant longtemps avec sa mère. Il endure une enfance difficile dans la pauvreté et avec un père absent. Mais surtout, il est Afro-américain. Dans une Amérique ségrégationniste comme celle des années 50, le jeune Ernie Davis n’a aucune chance de s’en sortir et son destin se limite à travailler à la mine comme son oncle. Davis a 17 ans quand il déménage à Elmira dans l’état de New-York. C’est là qu’il commence à jouer au football ainsi qu’au Baseball, où il est très doué également. Il démontre alors toutes ses qualités physiques pendant ses deux ans de compétition au lycée.
Repéré par l’Université de Syracuse près de New-York, le jeune Davis commence son histoire à la fois belle et tragique.
Dans l’ombre de Jim Brown, Davis écrit sa légende à Syracuse
Davis arrive chez les Orangemen juste après le départ de Jim Brown en 1959, drafté par les Browns. Sans avoir gagné le Heisman Trophy, ni de grands championnats universitaires, Brown a acquis une reconnaissance et s’est forgé une légende avant l’arrivée de Davis.
De part son physique et son jeu, le jeune Davis est l’héritier parfait de Jim Brown. Ce n’est surement pas un hasard d’ailleurs si Ernie Davis portait le numéro 44 sur son maillot, c’était aussi le numéro de Brown.
Dès sa première année, en 1959 , le jeune running back mène son équipe au sommet du championnat universitaire après une saison parfaite sans aucune défaite. Syracuse est qualifié pour le Cotton Bowl, un des matchs les plus prestigieux de la NCAA. Le Cotton Bowl se joue au Texas, sur les terres des Longhorns. Dans un climat de haine raciale, jouer un match au Texas pour un athlète noir relève du miracle.
Dans un match entaché de tensions et d’une bagarre juste avant la mi-temps, Syracuse arrache la victoire (23-14) grâce au MVP du match, Ernie Davis.
La saison suivante, Davis explose tout les records pour un running back universitaire. En neuf matches de saison universitaire, Ernie Davis compile plus de 877 yards à la course dont trois matchs à plus de 100 yards. Son record le plus exceptionnel est surement celui du nombre de yards par course avec plus de 7,5 yards en moyenne, un exploit pour l’époque. Malheureusement, les Orangemen ne profiterons pas de cette ligne de stats impressionnante et ne jouent, cette année-là, aucun championnat à cause d’une fiche de 7 victoires et 2 défaites.
En 1961, Davis entame sa troisième saison à Syracuse. De plus en plus engagé dans la lutte raciale, au coté de son cousin, Davis mets même sa bourse d’étude en danger après être allé à un rassemblement anti-ségrégation. Coté sportif, le running-back sort encore une énorme saison, et mène son équipe à une fiche de 8 victoires et 3 défaites. Les Orangemen gagnent le Liberty Bowl face à l’université de Miami (15-14) en 1961 et Davis rentre encore plus dans la légende.
Dans les pas de Jim Brown, Ernie Davis arrive en NFL par la grande porte
Davis est éligible à la draft NFL de 1962. Il est sélectionné par les Redskins avec le premier choix du premier tour. Dans la foulée, il est transféré à Cleveland surtout un coup de maître d’Art Modell, le gourou des Browns.
Ce transfert n’est pas qu’un fait d’armes de Modell, c’est aussi le paroxysme du racisme dans le football. En effet, le propriétaire des Redskins, George Preston, raciste notoire et revendiqué , est encore le seul à l’époque à ne pas vouloir signer des joueurs noirs dans son équipe.
Ernie Davis négocie son contrat avec les Browns à hauteur de 200 000 dollars sur trois ans. Il s’agit de la plus grosse somme jamais donnée à un rookie pour jouer en NFL. Cependant le rêve d’Ernie de jouer avec son idole Jim Brown tourne vite au tragique.
En effet, pendant la période des matches de gala récompensant les meilleurs joueurs universitaires, les médecins présents sur place diagnostiquent une leucémie au running back rookie.
Coup dur pour les Browns, Jim Brown et Davis. Celui-ci est absent du camp d’entrainement des Browns et ne revient que pour le début des matchs de présaison. Cette nouvelle vient « plomber » l’élan de l’équipe après la draft de Davis. L’état de santé du rookie semble s’aggraver jour après jour au fur et à mesure que Davis mets le pied sur le terrain. Finalement, après s’être rendu compte que son état empirait, et avec les conseils avisés de Jim Brown, le très jeune Ernie Davis met un terme à sa carrière à seulement 22 ans, sans avoir joué un seul match chez les professionnels.
Le seul moment de sa carrière où il apparu sur le terrain des Browns est juste avant le premier match de saison régulière où il fut honoré en rentrant dans le stade avec le numéro 45. Après la mort de Davis à 23 ans suite à sa leucémie, les Browns décident à titre posthume de retirer le numéro 45 en son honneur.
Anecdotes:
– Après la remise du Trophée Heisman , Ernie Davis a serré la main de J.F Kennedy. Un signal fort dans l’Amérique de l’époque.
– A son arrivé à Syracuse, Davis a été surnommé « l’Elmira Express » à cause de sa rapidité et de sa ville d’origine.
– Ernie Davis a été introduit au Hall of Fame universitaire en 1979.
– Davis est le premier joueur noir à remporter le Trophée Heisman.
Vidéo hommage à Ernie Davis