Il y aura fallu 36 ans à la NFL pour autoriser les conversions à deux points après son intronisation au niveau universitaire en 1958. Sujet de discorde entre les propriétaires qui veulent plus de spectacle et les coachs réticents à ce changement, la règle est adoptée le 22 mars 1994 à la majorité (23 votes de propriétaires pour contre 4).
Si certains botteurs comme Gary Anderson ne voient pas cela d’un bon œil pour leur travail, des entraîneurs comme Mark Levy, coach des Bills, pensent que l’impact va être limité (Buffalo News, 1994) :
« Je ne pense pas que cela va être souvent utilisé […] les entraîneurs vont avoir une approche pragmatique, ils ne l’utiliseront pas pour gagner les rencontres car il y a les prolongations. […] À mon avis, la seul fois où l’on pourra voir cela est quand une équipe sera mené de 11 points à cinq minutes de la fin ».
Même son de cloche chez Dan Reeves coach des Giants (Buffalo News 1994).
« Quel est le plus grand retour de l’histoire ? Buffalo contre Houston en playoffs en 1992. Ils n’ont pas eu besoin de conversion à deux points ».
D’autres entraîneurs, en revanche, sont déjà prêts à sauter sur l’opportunité : c’est le cas du jeune coach des Browns de 42 ans et à l’époque souriant, un certain Bill Belichick. Comme l’ancien quarterback et punter des Browns Matt Loede l’explique en 1994 dans « Game of my Life », Belichick a préparé son équipe aux conversions à deux points durant les camps d’entrainement. Lui et Scott O’Brien, coach des équipes spéciales, ont même un plan pour le premier touchdown de la saison.
Le jeu est simple, un jeu feinté où le joueur censé placer le ballon pour le botteur part à la course. Tom Tupa, ancien quarterback et bon athlète, joue le rôle du coureur dans scénario. Alors, quand les Browns inscrivent un touchdown sur une passe de Vinnie Testaverde pour Leroy Hoard en fin de premier quart-temps de la première rencontre de la saison contre les Bengals le 4 septembre 1994, Belichick dégaine son arme secrète. L’exécution est parfaite, les Bengals n’y voient que du feu et Tupa devient pour le coup le premier joueur à inscrire une conversion à deux points de l’histoire.
« Scott O’Brien a dessiné le jeu et c’était une évidence pour moi. Je n’avais qu’à prendre le snap et ne pas tomber […] Nous l’avions longuement travaillé à l’entrainement […] J’ai juste eu à prendre la balle et courir sur ma droite ».
Les Browns remportent la rencontre au Riverfront Stadium 28 à 20, mais sont plus conservateur sur la conversion du second touchdown, prenant le point au pied. Ils terminent la saison avec 11 victoires et 5 défaites avant d’être battus par les Steelers au second tour des playoffs. Tom Tupa réussit cette année-là trois tentatives à deux points, lui donnant au passage le surnom de « two-point TUPA ».
De nombreux entraîneurs sont finalement tentés en 1994 par ce nouvel outil. Sur 113 tentatives, 59 sont réussis en 1994. Un record qui n’est battu qu’en 2018 avec 66 réussites pour 122 tentatives.
Entre temps, la conversion à deux point a eu un attrait limité, ne dépassant que 5 fois les 40 réussites entre 1995 et 2016. Ce n’est finalement qu’à partir de 2016 que le total de 50 réussites est de nouveau dépassé. Une année auparavant, la NFL avait décidé de reculer à 33 yards la distance pour le coup de pied de transformation à la demande de nombreux coachs, dont Belichick. Un an plus tard, le même Belichick arrache la prolongation lors du Superbowl LI face aux Falcons avec une conversion à deux points… la boucle est bouclée !