Forcément. Il fallait commencer par lui. L’enfer du dimanche est sans aucun doute le film le plus connu lié au football américain.
S’il semble parfois y avoir un consensus pour dire qu’il s’agit d’un des meilleurs films de sport et un excellent film « tout court », il se trouve que ce film avait et a toujours des avis extrêmement mitigés.
Que ce soit celles de l’époque ou celles d’aujourd’hui, les critiques vont du tout au rien : « Lourdingue », « chef-d’œuvre », « dialogues confiés à des labradors », « meilleur film sur les coulisses du sport de haut niveau », « personnages caricaturaux »…
Pour expliquer la genèse du projet, il faut savoir que le film est le produit de trois scénarios et d’une bonne dizaine d’auteurs. Stone avait en effet travaillé un premier jet avec le journaliste Richard Weiner et l’ancien tighet end des Niners Jamie Williams. Il y a ensuite incorporé On Any Given Sunday, un script de John Logan, puis Playing Hurts de Daniel Pyne. Il s’inspirera également du livre You’re Okay, It’s Just a Bruise (En français, Tu vas bien, c’est juste une contusion), de Robert Huizenga, ancien docteur des Raiders dans les années 80, qui dénonçait le fait que son médecin chef cachait la gravité des blessures des joueurs par cette formule.
Un film extrêmement dense
Il est impressionnant de voir le nombre de thématiques liées au football que Stone est arrivé à mettre dans son film. De l’éternel remplaçant qui a enfin l’occasion de flamber joué par un Jamie Foxx dans son premier grand rôle (sachez que le rôle a été proposé à Cuba Gooding Jr., Chris Tucker et Puff Daddy, oui oui…), du vétéran qui voit son corps le rattraper (Dennis Quaid), de l’entraineur qui n’a plus la flamme (Al Pacino) mis sous pression par l’arrivée d’un nouveau coordinateur (Aaron Eckhart), de la propriétaire/héritière que l’on compare toujours à son père (Cameron Diaz), des médecins tiraillés entre leur devoir et les pressions de leurs supérieurs (Matthew Modine et James Woods, toujours excellent dans le rôle d’enfoiré qui lui va si bien), du journaliste prétentieux (John C. McGinley), Stone cherche à montrer l’ensemble du microcosme que constitue une équipe de football.
Pour cela, il utilise une narration éclatée, qui ne suis pas un seul protagoniste, mais plusieurs. Ainsi, le spectateur est amené à les suivre tous indépendamment les uns des autres, avec leurs enjeux et leurs décisions, et non à travers le prisme d’un personnage principal.
Car Oliver Stone n’est pas n’importe quel réalisateur. Qu’il soit derrière la caméra (Platoon, Wall Street, JFK, Tueurs nés…) ou à l’écriture (Scarface, Conan le Barbare…), il cherche à montrer les travers et la violence de la société américaine, et la façon souvent obscène dont elle se met en scène.
Ici, il critique violemment le sport-spectacle de la NFL à travers des personnages caricaturaux qu’il montre perdre une partie de leur humanité par l’argent et les paillettes. Aucun des personnages n’est réellement sympathique, s’arrangeant sans cesse de petites compromissions pour leur intérêt personnel au point d’en devenir grotesques.
Des caricatures plus vraies que nature
Car c’est là le cœur du film : Oui les personnages sont des caricatures, mais qui peut nier que ces comportements n’existent pas ? Prenez chaque personnage et essayez de lui trouver un alter ego dans la NFL moderne. Vous aurez 4 ou 5 exemples pour chacun en moins de 5 minutes.
Si le fond et ce qu’il essaye de montrer sont extrêmement intéressants, la mise en scène ne suit pas forcément, et particulièrement pendant les scènes de match. Stone y multiplie les effets cheaps, pour ne pas dire beaufs : caméra qui tremble, zoom, incrustations d’images (éclairs, tempêtes et j’en passe), cuts toutes les 2 secondes… Au final, cela rend le film plutôt lourd à supporter par moment, comme lorsqu’il fait un montage parallèle avec la course de chars de Ben-Hur. On a compris, les footballeurs sont les gladiateurs des temps modernes, pas la peine de nous le souligner au Stabilo.
Les jeux sont illisibles pour qui voudrait s’y intéresser, et l’amateur de foot restera sur sa faim de ce côté là. Alors qu’au contraire, une mise en scène cinématographique pourrait parfaitement rendre compte de toute la cohésion nécessaire à l’équipe et de l’urgence des prises de décisions.
La musique subit un peu le même sort. La bande son est plutôt bonne, mais les musiques sont tellement coupées et utilisées sous forme de clips qu’elles perdent toute leur force.
L’interprétation quant à elle est correcte mais sans plus. On a déjà vu Al Pacino, James Woods ou Aaron Eckhart plus inspirés, même si ce n’était pas forcément un film à Oscar.
Un classique quand-même
Au final qu’en est-il de toutes ces critiques positives et négatives ? Et bien toutes sont vraies. Oui, L’enfer du dimanche est un ramassis de clichés, oui, il est toujours sympa à regarder, oui la mise en scène est confuse, oui il est dynamique… En fait, L’enfer du dimanche, c’est un peu de tout ça, un patchwork de clichés et d’effets de styles, mais qui tombe souvent juste.
Tout dépendra de votre état d’esprit. Si vous n’en pouvez plus des films caricaturaux, passez votre chemin, si vous voulez regarder un film de sport bien classique avec grand discours du coach et ressoudage d’équipe pour aller gagner un match à la dernière seconde, cela reste peut-être un des meilleurs du genre.
Le conseil
Même si la VF a le mérite d’avoir George Eddy en commentateur, essayez de privilégier la VO, qui est de bien meilleure qualité.