À 24 semaines du Super Bowl LII, épisode 27 de notre rétrospective exceptionnelle, le Super Bowl XXVII.
Buffalo Bills (AFC) vs Dallas Cowboys (NFC) – 31 janvier 1993
Une renaissance ou un enterrement de première classe. La fin d’un long sommeil pour une franchise qui aura marché sur les 60’s et 70’s ou un râteau de plus pour une formation enfin sortie de l’anonymat à l’aube de ses 30 ans. Histoires diamétralement opposées. Enjeux contraires. Mais un même objectif : se couvrir de gloire. Et surtout, un même casting de rêve. Sur la pelouse du Rose Bowl de Pasadena, la NFL fait défiler ses plus belles stars. En défense, mais surtout en attaque, la crème de la crème. Un bal de danseurs étoiles. Reste à savoir qui mènera la danse.
Jamais deux sans trois
Battus, mais pas abattus, les Buffalo Stakhanovists et leur éternelle armée de Pro Bowlers continuent de voler sur la saison régulière. En tout, ils seront 12 à s’envoler pour Hawaï en février. Deuxième attaque la plus gourmande en yards (6114), meilleure escouade au sol (2436), la K-Gun et son épuisant no-huddle continuent de vider les défenses adverses de leur jus à coup de drives expéditifs opérés à un rythme démentiel. Repoussant les limites du possible, Thurman Thomas joue comme un enragé. 1487 yards et 9 touchdowns au sol, 626 et 3 touchdowns de plus dans les airs, le coureur galope comme un dératé. Dans sa foulée, Kenneth Davis ajoute 613 unités de plus pour venir booster un jeu au sol de dégénérés.
La vie est belle sur terre, et dans les airs aussi. Malgré un Jim Kelly plus maladroit qu’à son habitude, l’attaque à la passe continue de briller. 3457 yards, 23 touchdowns, 19 interceptions, du travail solide. D’autant plus quand on dispose d’un jeu au sol si menaçant. Planqué derrière l’une des lignes offensives les plus imperméables de la ligue, bâtie autour des Pro Bowlers Will Wolford, Jim Ritcher et Howard Ballard, le quarterback se gave et arrose généreusement. Pourtant, pour la première fois depuis leur première conquête infructueuse d’une bague de champions, Andree Reed et James Lofton se cassent les dents sur la barre des 1000 yards, malgré près de 1700 yards et 9 touchdowns cumulés.
Grands absents de la campagne 91, Jeff Wright et Bruce Smith sont de retour et redynamisent un pass rush en berne un an plus tôt. À eux deux, ils raflent 20 sacks et sèment la terreur dans les lignes adverses. Derrière eux, le trio de linebackers composé de Darryl Talley, Shane Conlan et Cornelius Bennett se goinfre en sacks, plaquages et turnovers. Au fond, la défense profite pleinement de l’explosion d’Henry Jones, meilleur intercepteur de la ligue avec 8 ballons volés dans les airs, pendant que son pote du dernier rideau Mark Kelso en chipe 7 de plus. Un gros bon en avant pour une escouade souvent dépassée en 1991. Tout les espoirs sont permis.
Dans le sillage d’une défense retrouvée et d’une attaque qui ne se démode pas, tout roule pour Buffalo. Un nouveau titre de division et un billet pour les playoffs leur tendent les bras. Et patatra. Battus sèchement par les Oilers en clôture de la saison, les hommes de Marv Levy glissent sur la dernière marche et laissent le trône de l’AFC Est aux Dolphins de Dan Marino. Un accro, mais pas une catastrophe. Les Bills joueront les séries, mais devront gagner un match de plus. Et ils devront le faire sans Jim Kelly, blessé sur l’AstroTurf de Houston, et qui manquera deux semaines. Mais quel match. Menés 35-3 par les mêmes Oilers de Warren Moon, les Bisons reviennent de l’enfer dans une rencontre d’anthologie pour arracher un succès de rêve en prolongations (41-38). The Comeback. Les Steelers et Dolphins matés sans drame, Buffalo file à l’ouest. La peur au ventre, les Bills s’envolent vers Pasadena avec une vilaine phobie impossible à chasser : devenir la première franchise à perdre trois Super Bowls consécutifs. Jamais deux sans trois ?
À Dallas aussi jamais deux sans trois. Michael Irvin et Troy Aikman sont dans les parages ? Emmitt Smith ne doit pas être bien loin. Réunis depuis 3 ans, ils ont ressuscité des Cowboys rois des 70’s portés disparus depuis une décennie. Le GM et président de toujours Tex Schramm poussé vers la sortie, l’iconique Tom Landry abruptement remercié après le rachat de la franchise par Jerry Jones, Jimmy Johnson reprend les rênes de Dallas en 89 et signe la pire campagne de la franchise depuis sa saison inaugurale. 1-15. Un an plus tard, ils décrochent 7 succès. L’année suivante, ils échouent au 2e tour des playoffs. En 92, les Triplets arrivent à maturité. Matures et avec un message pour le monde : « America’s Team is back ! » Profitant de résultats en berne, le staff de Dallas rebâtit au travers de la draft et de pas moins de 46 échanges aussi tapes à l’œil que futés. Le résultat : un effectif 5 étoiles promis à régner (presque) sans partage sur les 90’s.
Bâtie pour contrôler le jeu sans fioritures, mais avec un maximum d’efficacité et un minimum de risques, l’attaque portée par Troy Aikman est la 2e plus prolifique de la ligue (409 points). Au somment de son art, le quarterback lance 3445 yards, 23 touchdowns et 14 interceptions. La campagne la plus aboutie de sa carrière. Leader émotionnel et aérien, Michael Irvin vole au-dessus de la concurrence et capture 1396 yards et 7 touchdowns. En équipiers modèles, Alvin Harper et le tight end Jay Novacek enfilent avec brio le costume de valves de sécurité. Intenable, barricadé derrière The Great Wall of Dallas, Emmitt Smith flotte une nouvelle fois sur la ligue, conquit 1713 yards au sol, marque 18 fois et ajoute 335 unités dans les airs. Une machine yardophage.
Malgré l’absence du moindre Pro Bowler dans ses rangs, la défense texane est la plus radasse en yards de la ligue, la 4e à concéder le moins de points et la meilleure escouade anti jeu au sol. Un CV à faire frémir les nostalgiques de la Doomsday Defense des années dorées. Porté par les 26 sacks de Jim Jeffcoat, Tony Tolbert et du futur Hall of Famer Charles Haley, le pass rush affole les défenses, pendant que Ken Norton Jr. et le Rookie Défensif de l’Année Robert Jones rôdent au cœur du terrain. Un savant alliage de vitesse, de puissance et d’agressivité calculée en défense et de talent hors du commun en attaque qui ne s’incline que 3 fois et prend le pouvoir dans une NFC Est ultra-relevée. Philly écartée avec la manière au premier tour, les Niners et leur flopée de superstars sont maitrisés avec autorité en finale de conférence. Une victoire à l’extérieur, comme les Bills. Deux champions sacrés loin de leurs antres, une première depuis le Super Bowl I. 14 ans après son dernier Big Show, Dallas retrouve le Big Game.
La foudre frappa deux fois
Sans l’étroitesse d’esprit la plus édifiante et rétrograde d’Evan Mecham, le Super Bowl XXVII se serait déroulé sous le soleil de plomb du Sun Devil Stadium de Tempe, dans l’Arizona, tanière des Phoenix Cardinals. Mais voilà, le sénateur Républicain, successeur du Démocrate Bruce Babbitt qui avait fait passer en force, par voie d’ordre exécutif visant à contourner le refus du Congrès de l’Arizona, l’application du décret du Président Ronald Reagan créant le Martin Luther King Jr. Day, jour férié honorant le symbole de la lutte pour les droits des Noirs, ne porte pas le pasteur dans son cœur. MLK ne mérite pas d’être honoré de la sorte et les Afro-Américains qui le supportent feraient mieux d’aller se trouver un boulot. Charmant personnage. Et gros tollé. Portée par la veuve de Luther King et le chanteur Stevie Wonder, la fronde exige un boycott complet de toutes les conventions et événements prévus dans l’Arizona.
Malgré l’impeachment de Meachem en 89 et la promulgation du décret Reagan par le Congrès de l’Arizona, la Constitution de l’État exige que l’ajout de jours fériés soit validée par un vote populaire. Le 13 mars 1990, réunie à Orlando, la NFL attribue l’organisation du Super Bowl XXVII à la ville de Tempe, dans l’Arizona. Mais le proprio des Eagles Norman Braman prévient, si le référendum rejette le MLK Day, la ligue reviendra sans hésiter sur sa décision. Dans un championnat composé très majoritairement d’Afro-Américains, la menace tombe sous le sens. À l’issue d’un scrutin confus, rendu incompréhensible par deux initiatives simultanées aux modalités floues, le couperet tombe. Le 19 mars 91, réunie à Hawaï, la NFL confie l’organisation du Super Bowl XXVII à Pasadena. L’année suivante, les électeurs de l’Arizona devront bêtement répondre oui ou non à la création du MLK Day. Le oui l’emportera et en 93, la ligue récompensera finalement Tempe avec le Super Bowl XXX.
Troy Aikman a beau découvrir la plus belle scène que le ballon à lacet puisse offrir, il est imperméable à la pression et endosse son rôle de leader avec une aisance déconcertante. Même face au double mètre de John Gesek la veille du match de sa vie, le passeur ne se dégonfle pas et pousse un gueulante aux allures d’avertissement.
« Il m’a dit, ‘Leurs defensive backs ne peuvent pas couvrir nos receveurs, mais ils n’en ont pas besoin parce que leur pass rush met une pression immense. Il va falloir les bloquer les gars’, » racontera Gesek dans les colonnes du LA Times.
Message reçu. Bruce Smith en fera les frais.
S’ils ont beau connaître la pression du Big Game comme personne depuis 2 ans, les Bills sont donnés perdants. Entre une NFC toute-puissante depuis près d’une décennie et le syndrome de la lose hérité des Vikings et Broncos, les astres ne s’alignent pas vraiment en faveur de la franchise des rives du lac Érié. Mais Jim Kelly et ses potes se foutent bien des bookmakers et de leurs prédictions de pacotille. Après un rapide stop en défense, Steve Tasker, arme secrète de leurs équipes spéciales, bondit devant le punter texan, bloc le dégagement et envoie le ballon en dehors des limites, à 16 yards de l’en-but de Dallas. 4 actions plus tard, Thurman Thomas croise la ligne et offre aux siens un départ de rêve. Malmenés par leur indiscipline, les ‘Boys avancent pour mieux reculer en attaque et sont sur les talons en défense.
Maîtres de leur sujet, les Bills prennent à la gorge des Cowboys paralysés par l’enjeu. Dépassés par leur manque d’expérience. La panique les guettes. C’est sans compter sur un Troy Aikman d’une sérénité bluffante.
« Quand on a tous tourné nos regards vers Troy, ils nous a juste regardés sans rien dire, » se souvient le guard Nate Newton. « Ils ne s’en est pas pris à nous, ne nous a pas gueulé dessus pour telle ou telle raison. Il nous a juste regardés. On a su à ce moment-là qu’il fallait juste qu’on se calme, qu’on continue de joueur notre jeu et que tout allait bien se passer. Notre leader n’allait pas se laisser gagner par la panique, alors il n’y avait pas de raison que nous, joueurs de moindre importance, soyons gagnés par la panique. »
S’il n’y parait rien, intérieurement, le quarterback est nerveux. Mais en meneur irréprochable, il ravale ses inquiétudes et irradie ses coéquipiers d’une confiance et d’une maîtrise de soi contagieuses. Les Triplets emmerdés par la tactique agressive des Bills, le safety réserviste Kenneth Gant vient à la rescousse. Lancé comme une bombe sur un blitz, il contraint Jim Kelly à lâcher le ballon rapidement. Trop rapidement. Le cuir file dans les mains du safety James Washington et Troy Aikman ne tarde pas à capitaliser. Du milieu du terrain, il avance au pas, avant d’envoyer Jay Novacek dans la peinture sur une passe de 23 yards. 7-7. Collée à leurs dix yards après un bloc illégal sur le coup d’envoi, la ligne offensive de Buffalo prend la marrée, Charles Haley mange Kelly tout cru, gobe le ballon au passage, le gros Jimmie Jones et ses 130 kilos le ramassent sur la ligne de 2 et plongent dans la endzone. En 15 secondes et deux revirements, le match vient de basculer.
Sonnés, mais loin d’être K.O. les Bills répliquent sur une bombe de 40 yards dans les mains d’Andre Reed. Pourtant, propulsés sur les 4 yards de Dallas, ils se cassent les dents sur la ligne. Une course pour rien, deux, trois. Sur un 4e essai trop tentant, Marv Levy choisit le tout pour le tout. Bloqué au sol, Kelly opte pour les airs et trouve les mains de Thomas Everett, le safety texans… Touchback. Après un drive pour rien, les Bills récupèrent le cuir. Ken Norton Jr. dévore le quarterback de Buffalo et lui fait sauter le genou qui l’avait privé des deux premiers match des séries. Sale scénario. Un vrai film d’horreur. Héros des deux premiers tours, Frank Reich entre en jeu avec une mission simple : renverser le momentum avant qu’il ne soit trop tard. Inspiré, le passeur distribue quelques jolis lancers et les Bills cognent à 4 yards des portes de l’en-but. Stoppés sur un 3e et un, ils choisissent cette fois-ci la voie de la raison plutôt que celle des airs. Remplaçant d’un Scott Norwood maudit envoyé à la retraite pendant l’été, Steve Christie réduit l’écart. 14-10.
La mi-temps approche à grand pas et les hommes de Buffalo croisent les doigts pour limiter la casse avant de reprendre leur souffle. Peine perdue. En 5 jeux, les Cowboys traversent le terrain comme des fous furieux. Quelques passe courtes d’Aikman, une course enivrante de 38 yards d’Emmitt Smith, puis une lecture parfaite du jeu qui envoie Michael Irvin faire la fiesta dans la peinture sur une passe de 19 yards. Du grand art. Dans la foulée, Thurman Thomas se fait arracher le ballon sur une swing pass. La sentence est immédiate, le passeur envoie une passe millimétrée dans le coin, Irvin attrape le cuir, s’étend de tout son long au-dessus du pilonne orange et s’offre un doublé supersonique et élastique en 18 secondes. 28-10. Après un fumble évité de justesse par Kenneth Davis, Reich balance une interception dans les bras de Larry Brown. Dans chaque quart-temps, les Cowboys n’auront eu besoin que d’une poignée de secondes pour assommer les Bills. Pragmatique et appliqué. Le football sauce texane. Du beau spectacle. Endormis, maladroits, à côté de leurs pompes et coupables de 5 revirements. Le football sexy prôné par Marv Levy est porté disparu. Pendant que tous les acteurs filent au vestiaire se congratuler en soufflant un coup ou prendre une soufflante, la pelouse du Rose Bowl de Pasadena se prépare pour un autre show. Et quel show.
Pop’n Roll
Pour la première fois dans l’histoire du Super Bowl, la NFL choisit d’abandonner les grandes kermesses pleines de gamins surexcités façon carnaval Disney pour faire venir le meilleur ami des enfants. Pas Ronald McDonald. Non, Michael Jakson. Le Roi de la pop à l’apogée de son règne. Une formidable entreprise de com visant à attirer un public profane et à étendre l’audience toujours plus grande du Big Game. Jam, Billie Jean, Black or White, We Are the World, Heal the World. En cinq titres, Michael électrise la nuit californienne. Dans les coursives du stade, Michael Irvin s’éclipse discrètement du vestiaire pour aller admirer le Roi de la pop. Un succès magistral. Le Super Bowl vient d’entrer dans une nouvelle ère. Le show de la mi-temps n’est plus qu’une vulgaire « pause pipi » comme l’expliquait Sandy Grushow, responsable du marketing de la FOX au début des années 90. Les gens ne désertent plus leurs téléviseurs pour aller vider leurs vessies, retourner les ailes de poulet dans le four et faire le plein de bières fraîches. Non, ils regardent un autre spectacle. Sans casques, ni ballon.
Visiblement surexcités par le show de la mi-temps, les Cowboys remontent 77 yards à petit pas. Peut-être bien trop excité, Troy Aikman balance une passe trop haute au-dessus du casque de Novacek dans l’en-but et Lin Elliott entre en piste pour ajouter 3 points. S’en suit un quart-temps mollasson entre deux équipes qui se neutralisent. Pendant que les Triplets font tranquillement retomber l’acide lactique, Bruce Smith continue de se casser les dents contre une ligne offensive intraitable. Puis sur le dernier jeu de la 3e période, la lumière. Frank Reich expédie une bombasse de 40 yards dans les mains gantées de Don Beebe. Touchdown. N’en déplaise aux ‘Boys. Forcé de s’extraire de sa poche pour éviter le pass rush texan, le quarterback aurait dépassé la ligne de 40 martèlent les hommes de Jimmy Johnson. Neni. 31-17.
Avec 15 minutes à jouer et un déficit de 14 points à combler tout semble encore possible. Surtout quand quelques semaines plus tôt on est revenu du fin fond du Mordor pour réduire en cendres un retard de 32 points. Après un touchdown longue distance de 45 yards tombé directement dans les mains d’Alvin Harper dans les premières minutes du dernier quart, l’équation vient de prendre quelques variables de plus. Il leur faut désormais 21 points. 21 points, c’est ce que les Cowboys vont leur infliger dans un ultime quart-temps aux allures de carnage, sous les yeux d’un Thurman Thomas totalement fantomatique. De quoi donner une crise cardiaque à PETA. Après le touchdown d’Harper, Frank Reich se fait de nouveau intercepter par Everett. Emmitt Smith convertit l’offrande 3 jeux plus tard sur une course de 10 yards, avant que le passeur de Buffalo ne rate le snap sur un shotgun et n’offre 6 points cadeaux à un Ken Norton Jr. aux anges. 52-17. Trois touchdowns en 2 minutes 33. C’est plié. Troy Aikman peut commencer à savourer.
« Ce match représente tellement pour moi, » confiera-t-il après le match. « Un poids considérable s’est envolé de mes épaules. Peu importe ce que me réserve la suite de ma carrière, je pourrai dire que j’ai emmené mon équipe jusqu’au Super Bowl et l’ai gagné. Nous ne sommes pas nombreux à pouvoir en dire autant. Je n’ai jamais rien ressenti de pareil dans ma vie. Si seulement tous les joueurs pouvaient vivre ça un jour. »
Après un échange de fumbles presque comique dans une fin de match anecdotique, orpheline du moindre enjeu, Jim Jeffcoat envoie de nouveau Reich au tapis et lui fait sauter le ballon des mains. Trop heureux, Leon Lett ramasse le cuir et s’envole vers le bonheur 64 yards plus loin. Jubilant, le lineman défensif fait le malin, célèbre déjà 10 yards avant la ligne. Grave erreur. Revenu de nulle part, Beebe tape dans le cuir juste avant qu’il ne croise la ligne et l’envoie filer derrière l’en-but. Touchback. Hilarant. La honte d’une vie pour Leon Lett, un effort remarquable pour le receveur de Buffalo dans un match déprimant et perdu depuis belle lurette. Les Cowboys viennent d’échapper le record de points inscrits dans un Super Bowl. Mais l’essentiel est ailleurs. Transcendés par une défense qui vient d’infliger 9 turnovers records, ils règnent de nouveau sur les gridirons. Les Bills, eux, sont six pieds sous terre. Encore un niveau et ils rejoindront les Vikings au 4e sous-sol de la honte. Un enterrement 5 étoiles sous les yeux de plus de 98 000 fans et des millions de téléspectateurs à travers la planète.
Sacré en tant que joueur avec les Razorbacks d’Arkansas en 64 et en tant que coach en 87 avec The U de Miami, Jimmy Johnson devient le premier coach à décrocher une couronne universitaire et NFL. Ce titre, il le sentait venir depuis le début. Après des années à ériger un roster dégoulinant de talent, le temps de partir à la conquête du Graal était venu. Une simple question de temps. Une évidence. Les Cowboys avaient gardé le meilleur pour la fin.
« Nous l’avons dit toute la saison, notre meilleur match sera notre dernier, » se réjouira le coach après la rencontre. « Nous avons gardé le meilleur pour la fin. Nous avons vraiment bien joué tout au long des séries. J’ai toujours été persuadé que nous avions la meilleure équipe. »
Nate Newton et Jim Jeffcoat offrent une douche de Gatorade à leur coach. Jerry Jones dégaine un peigne pour remettre dans l’ordre dans la coiffure de son coach avant de passer devant les caméras aux côtés du commissioner Paul Tagliabue. De retour aux vestiaires, Bill Clinton décroche le téléphone pour le féliciter. L’omnipotent proprio et GM savoure. Une nouvelle dynastie vient d’arriver au pouvoir. Giants, Redskins, Cowboys. Depuis 3 ans, les rois de la NFL résident dans l’Est de la NFC. Depuis 3 ans, les fossoyeurs des Bills résident dans l’Est de la NFC.