À 32 semaines du Super Bowl LII, épisode 19 de notre rétrospective exceptionnelle, le Super Bowl XIX.
Miami Dolphins (AFC) vs. San Francisco 49ers (NFC) – 20 janvier 1985
Un gazon vert taillé au ciseau. Un cadre idyllique, ensoleillé. Des trous. Des balles. Des Maîtres. Augusta ? Non. Des trous piqués d’un drapeau jaune ? Non plus. Des petites balles blanches ? Encore moins. Au lieu de ça, le cadre prestigieux de l’Université de Stanford, des ballons à lacet et des trous imaginaires. Ceux laissés par des défenses inattentives, prêts à être comblés par deux Maîtres. Joe Montana le Roi et son Dauphin, Dan Marino.
Artificiers en chef
Après deux décennies émaillées de glorieux épisodes, les Dolphins amorcent la transition. La quête d’un nouvelle identité. Adieu le jeu au sol survitaminé. Adieu les défenses rugueuses et moustachues sauce 70’s. Le 26 avril 1983, avec le 27e choix général, les grand gourous de Miami draftent la pépite de Pitt. Il aurait tant aimé porter le Noir et Jaune de ses Steelers bien aimés. Marcher dans les pas de Terry Bradshaw, le canonnier blond de sa Pittsburgh natale. Les Dieux du football lui réservent un tout autre destin. Ailleurs. Plus au sud. Un destin plus chaud. Un destin cruel. Le 26 avril 1983, le Steeler de cœur change de costume. Le 26 avril 1983, Dan Marino devient un Dauphin pour la vie.
1983 sera la saison de l’apprentissage. Son tour viendra, c’est une évidence. Quand ? C’est une question de patience. En semaine 3, Dan déploie pour la première fois son bras dans la NFL. 3 semaines plus tard, il débute la première rencontre de sa carrière. 7 jours plus tard, sur la route, il décroche son premier succès. Haut la main. Il reste 9 matchs, les Dolphins n’en perdront qu’un seul. 12-4, un carton d’invitation pour le Pro Bowl, une jolie statuette de Rookie de l’Année et un ticket en première loge pour les playoffs. Face à des Seahawks à peine sortis de leur coquille et qui découvrent eux aussi les playoffs, sa première désillusion. Un petit tour et puis s’en va. Après une année à chauffer le moteur, Dan lâche les chevaux.
Explosion, éruption, supernova. Les qualificatifs manquent. Le quarterback établit un nouveau record de passes complétées (362) et devient le premier joueur à éclipser la barre des 5000 yards. 5084. Dans un football qui commence tout juste à prendre son envol, Dan vole dans une autre dimension. 9 matchs au-delà des 300 yards, 4 au-delà des 400. 6 fois il marquera au moins 4 fois. 4 semaines de suite, il inscrira au moins 4 touchdowns. Des records aux allures de tremblement de terre. Jamais la NFL n’a connu pareil extraterrestre. Les 36 touchdowns records du Oiler George Blanda en 61 et du Giant Y.A. Tittle en 63 sont explosés. Marino prend l’autoroute des airs et trouve la peinture 48 fois ! Une marque qui tiendra 20 ans. Face aux yeux effarés d’une NFL qui n’y était pas encore préparée le gamin de Pittsburgh est en train de redessiner le poste de quarterback. D’en rehausser les standards. À Miami, il devient le soleil autour duquel tout tourne. Le point névralgique de l’équipe. L’image de toute une franchise.
Boulimique de yards, génie de son sport, Marino lit les défenses avec une aisance déconcertante. Des bibliothèques entières aux livres grand ouverts. MVP, Joueur Offensif de l’Année, Pro Bowler, All-Pro, on prend déjà ses mesures du côté de Canton. Planqué derrière une ligne emmenée par le centre All-Pro Dwight Stephenson et le guard Pro Bowler Ed Newman, il n’est sacké que 14 ridicules fois. En playoffs, il ne le sera tout simplement pas. De quoi faire pleurer Russell Wilson. Dans la vague de son nouveau messie, la paire de receveurs composée de Mark Clayton et Mark Duper se gave. Plus de 70 réceptions et 1300 yards pour les deux, 18 touchdowns records pour le premier, 8 pour le second. Dans une attaque obsédée par l’air frais, pas de star dans le backfield, mais un trio de coureurs à tout faire qui apporte sa pierre à l’édifice. Une attaque tout feu tout flamme qui agite les débats de la semaine menant au jour fatidique.
« Pendant toute la semaine, les gens ne parlaient que de l’attaque de Miami : ‘Comment allez-vous les arrêter ?' » se souvient Montana. « Au fond de nous, nous savions que nous avions une remarquable attaque nous aussi. Mais personne ne se posait la question de savoir comment nous arrêter. »
Grave erreur. Phénoménale en attaque, la franchise de Miami est nettement moins terrifiante en défense. Ou bien dans le mauvais sens du terme. Escouade la moins étanche au sol de la ligue, elle navigue dans le ventre mou. Défense passoire, mais non sans talent. Les frangins Blackwood et Bob Baumhower, survivants de la Killer Bees du Super Bowl XVII, d’un côté, le Joueur Défensif de l’Année Doug Betters et ses 14 sacks de l’autre. De quoi venir chatouiller les côtes de Joe Montana. Et il le faudra bien pour espérer contenir sa maestria. Les Seahawks écartelés au premier tour dans une revanche sans grand suspense, les Steelers atomisée au deuxième dans une orgie offensive jouissante, Dan Marino, injouable, s’ouvre grandes les portes de son premier Super Bowl. Le début d’une longue série lui prédit-on. Si seulement.
Pendant que le Fils répand la bonne parole dans le sud de la Floride, Joe Montana le Père coule des jours heureux dans la baie de San Francisco. Pour la première fois depuis le passage au format à 16 matchs, une franchise décroche 15 succès. Un seul faux pas. À domicile, de 3 points face aux Steelers. Une piqûre de rappel. Rien n’est jamais gagné d’avance. Se laisser griser par les victoires qui se succèdent, le plus grand piège. Après leur couronnement du Super Bowl XVI face aux Bengals, les chercheurs d’or ont très mal vécu la grève de 82. 3-6, pas de playoffs et comme un goût désagréable sur le bout de la langue. Le sacre de 81 devait marquer le début d’une ère prospère. Un an plus tard, c’est déjà le coup d’arrêt. Mais pas pour longtemps. La NFL reprend ses droits et les 49ers leurs bonnes habitudes. Malgré 10 succès et une finale de conférence malheureuse en 83, les 49ers repartent en guerre. À la conquête du Graal.
À la tête d’une attaque de 5 Pro Bowlers, Joe Montana amasse 3630 yards, 28 touchdowns et 10 interceptions. Porté par la triplette Roger Craig/Wendell Tyler/Earl Cooper, le jeu au sol conquit plus de 3200 yards et 20 touchdowns sur la terre comme aux cieux, s’engouffrant dans les brèches béantes ouvertes par Randy Cross, Fred Quillan et Keith Fahnhorst, les 3 Pro Bowlers d’une clinquante ligne offensive. Dans les airs, le tandem composé de Dwight Clark et Freddie Solomon dévore 1617 yards et 16 touchdowns. Derrière les 513 points et 7064 yards des Fins, on ne fait pas mieux que les 475 points et 6544 yards des Californiens.
À l’inverse de Dolphins aux deux visages, les Niners sont aussi généreux en attaque que radins en défense. Escouade la plus étanche de la ligue, ils ne concèdent que 227 points, moins de 15 par matchs. 3 ans plus tôt, ils choisissaient de prendre à contrepied une NFL habituée à bâtir ses succès défensifs autour d’un front seven puissant et d’un pass rush sauvage en investissant dans le fond du terrain. Résultat : un quatuor de Pro Bowlers en guise de dernier rideau. Ronnie Lott, Eric Wright, Carlton Williamson et Dwight Hicks. Face à un Dan Marino passé maître dans l’art de dompter les sacks et lancer sous pression, ils sont peut-être bien les seuls à pouvoir enrayer la puissance de feu des joueurs de Miami. Pendant que les Fins s’ouvrent le chemin du Super Bowl en atomisant leurs rivaux, la franchise de Cisco s’en remet à une défense trop sous souvent sous-estimée pour écarter les Giants (21-10) et éteindre les Bears (23-0).
Super Bowl XIX, Super Bay I
Pas besoin de traverser le pays. Pas besoin d’avion. Les 49ers ont donné rendez-vous avec le destin en terrain connu. À Palo Alto, au sud de la baie de San Francisco. À une petite heure en bus. Sur les affiches promotionnelles, le trophée Vince Lombardi trône fièrement à côté du Golden Gate Bridge. Un Super Bowl à la maison. Un cadeau empoisonné qui n’avait pas porté chance aux Rams lors du Super Bowl XIV. Dans un Stanford Stadium et sur un campus bien loin des standards NFL, la ligue débourse un million de dollars de sa poche pour ériger des vestiaires plus appropriés pour les Dolphins. Même à l’autre bout du pays, l’effervescence autour de la franchise de Miami et de son quarterback est telle que Dan Marino doit s’enfuir par les cuisines et la sortie de service pour éviter la marée humaine qui l’attend systématiquement en bas de l’hôtel. La presse n’a d’yeux que pour lui. De quoi titiller l’orgueil de Joe et ses potes.
« Tu t’en fiches d’être sous-estimé à ce point, mais parfois (les journalistes) donnaient l’impression d’oublier qu’il y avait deux équipes, » confiera la quarterback. « Au bout d’un moment, ça a commencé à tous nous agacer. Mais on ne pouvait pas aller contre les stats de Dan. Il a réalisé une incroyable saison. »
Et il n’est pas le seul. 17-1 d’un côté, 16-2 de l’autre, 33-3 au total. Jamais le Super Bowl, dans son histoire désormais cinquantenaire, n’a offert pareille affiche. Les deux meilleures équipes de la ligue, mais un seul trophée à soulever. Un match à mort entre deux superstars qui commencent tout juste à écrire leurs légendes. Pour l’une, une ère faste, une dynastie, pour l’autre, des regrets pour la vie. À la veille de sa prestation de serment, Ronald Reagan le Californien, fraîchement réélu, devient le premier Président des États-Unis à effectuer le coin toss.
Sous les caméras de l’équipe de tournage de Ace Ventura: Pet Detective, le retourneur Derrick Harmon met les Niners dans l’embarras dès le coup d’envoi. Trop près du bord du terrain, il attrape le ballon un pied en touche, sur sa ligne de 6… Si Joe Montana & Co parviennent à prendre un peu d’air, ils doivent rapidement rendre le cuir. Dan Marino attaque par une première passe ajustée, les jeux et les yards s’accumulent et les Fins se retrouvent aux portes de la redzone. Troisième essai, il reste 23 yards à combler pour piétiner la peinture. Le quarterback trouve les gants de Mark Clayton, mais le receveur est fauché par Eric Wright à 2 yards du first down. Le berlinois Uwe von Schamann entre en scène et ouvre la marque. 0-3. Un avantage qui ne va pas faire long feu.
Après une entame de partie délicate, Joe Montana déboule le terrain à toute vitesse et les Niners remontent 78 yards en 8 actions. Les 33 derniers yards sont comblés dans les airs par Carl Monroe, le coureur réserviste. 7-3. Les Dolphins attaquent au sol et piègent la défense californienne en adoptant une no-huddle offense qui les empêche de procéder à des changements et contraint l’escouade prévue pour contrer le jeu au sol à rester sur le terrain. 18, 13, 11, 21 puis 2 derniers yards. Marino enchaîne 5 passes consécutives pour redonner l’avantage aux siens. 7-10. Yeux écarquillés, cœurs battants, les 84 059 fans du Stanford Stadium bavent de bonheur. Joe Montana le Roi et Dan Marino le Dauphin sont bien au rendez-vous. La passation de pouvoir aura-t-elle lieux ?
9/10, 103 yards et un touchdown. Fidèle à lui même, le passeur de Miami semble parti pour péter tous les records existants. C’est sans compter sur Bill Walsh. En fin stratège déterminé à enrayer la montée en puissance du passeur de Miami, le coach s’ajuste et glisse de sa 3-4 habituelle vers une dime defense qui déconcerte les Fins. 4 hommes sur la ligne, un linebacker, 6 defensive backs. En face, Don Shula réplique en attaquant au sol. En vain. Une stratégie contre nature.
« Il nous ont dicté leur loi à partir du moment où ils sont passés à 4 sur la ligne, » concédera Dan Marino après la rencontre.
Même dépeuplé, le front seven devenu front five des chercheurs d’or demeure forteresse imprenable. Paralysés dans les airs, bloqués sur terre, les Dolphins rendent rapidement le ballon. Un parpaing du punter Reggie Roby qui ne s’écrase que 37 pauvres yards plus loin. Son bras, ses jambes. Joe Montana sort la totale et engloutit les 47 yards qui le séparent de la peinture en 5 petits jeux. 14-10. Les Niners chavirent en tête. La mi-temps est encore loin, mais le match vient de vivre un tournant.
Joe Cool, Daddy Cool
Si les Californiens sont inspirés, les Floridiens sont en panne sèche. Le punter entre de nouveau en scène et se rate. Encore. Un dégagement de 40 yards, une remontée de 28, 15 de plus en 2 courses tranchantes puis une passe ajustée de Joe dans les mains de son tight end Russ Francis. L’en-but n’est plus qu’à 11 yards. Roger Craig fait la moitié du chemin, le quarterback se charge du reste. Touchdown. 21-10. Déjà. Et toujours pas de réplique en face. Après avoir décortiqué soigneusement la défense de San Francisco sur ses deux premières séries, Dan Marino a sombré dans le mutisme. Et pendant ce temps, Reggie Roby et ses pichenettes sont en train de faire perdre la bataille du terrain à Miami. Les distances sont raccourcies, la tâche des Niners facilitée comme rarement. Un jour sans pour le troisième punter afro-américain de l’histoire.
« C’est le meilleur punter de la ligue, mais il n’a pas joué comme tel aujourd’hui, » commentera Don Shula après le match.
Trois petits jeux et un punt, encore. Un de trop. Sacké d’entrée de série, le Joe gobe 26 yards sur les deux actions suivantes. Reculer pour mieux sauter. Puis la chute. Ou presque. Montana envoie le cuir dans les gants de Freddie Solomon. Le receveur fait un pas, puis laisse s’envoler le ballon sous l’impact généré par le safety Lyle Blackwood. Le défenseur attrape le ballon illico presto et s’envole dans la direction opposée. Changement de momentum ? Non. Positionné au niveau du secondary, le field judge Bob Lewis s’agite pour signaler une passe non complétée. Campé au même niveau, mais à l’opposé du terrain, le side judge Bill Quinby ne signale rien, n’infirme rien. Il était pourtant le plus proche de l’action. 5 jeux plus tard, Roger Craig croise la ligne pour la seconde fois. 28-10.
Il reste 2 minutes avant la pause, mais plus grand monde pour croire aux chances de retour des Dolphins. 9 passes lancées, 7 complétées plus tard, rien de bien différent. À 12 yards de l’espoir, les Dolphins se cassent les dents sur les orpailleurs. von Schamann a beau passer 3 points, la montagne rouge et or semble s’élever un peu plus vers le ciel à chaque seconde qui s’égraine. Avec 12 secondes à jouer avant le repos, Miami sert les fesses pour ne pas sombrer. 12 secondes, c’est bien plus qu’il n’en faut pour Joe Montana. De ces 12 secondes pourtant, il n’en aura pas une. Jusque là proches de la perfection, les 49ers se foirent sur le coup d’envoi. À la réception du botté court, le guard Guy McIntyre a la sagesse d’esprit de s’agenouiller avant de brusquement se raviser. À peine redressé sur ses deux jambes, le colosse d’un mètre 90 et 125 kilos est retourné comme une grosse galette œuf-jambon-fromage par le rookie Joe Carter, médaillé d’argent olympique au lancer du poids quelques mois plus tôt et quelques dizaines de kilomètres plus au sud, et offre trois points au kicker est-allemand. 28-16. L’électrocardiogramme des Dauphins reprend un peu d’altitude. McIntyre, lui, ne rigole pas du tout.
« Je peux en rire maintenant, mais sur le coup ça ne m’a pas fait marrer du tout, » témoignera le guard après le match. « Mon premier réflexe quand j’ai récupéré le ballon a été de m’accroupir au sol. Puis j’ai entendu tout le monde crier, ‘Lève toi ! Lève toi !’ Alors je me suis relevé, et un adversaire m’a pris par en-dessous et fait sauter le ballon en me percutant. »
Un raté en guise de sirène d’alarme : gare à la déconcentration. Le match leur tend les bras. Face à des Dolphins impuissants et sans armes pour renverser la vapeur, il ne tient qu’à eux de le perdre. Seuls. Comme des grands. Mais ça n’est pas vraiment le genre de la maison. Les joueurs de Miami vont très vite en faire l’amère constat. -1 yard sur la première action du second acte, une passe non complétée et un sack qui renvoie Marino 9 yards plus loin. Revoilà déjà Reggie Roby. Pour la quatrième fois du match. 3 points de l’Autrichien Ray Wersching et 2 nouveaux sacks plus tard, il est déjà de retour. Passeur le mieux protégé de toute la saison régulière, Dan Marino est pris d’assaut, ses défenses plient, cèdent et le passeur mange le gazon quatre fois. Les Marks Brothers sont aux abonnés absents. Le jeu au sol tétanisé et abandonné depuis belle lurette. Rien à faire. Même Reggie Roby, le punter à la jambe bionique est à côté de ses pompes. En face, Joe Montana n’a besoin que de deux passes pour traverser la moitié du terrain. 40 pour son coureur Wendell Tyler. 14 pour son tight end Russ Francis. 3 jeux plus tard, Roger Craig comble les 16 yards qui le séparaient d’un triplé inédit et scelle définitivement l’issue du match. 38-16.
Impériale, l’attaque californienne se retire gentiment pour laisser la défense briller. Dan Marino en fera les frais par 2 fois. 2 interceptions presque anecdotiques. Une sur la ligne de un yard, une autre dans la endzone. Les ultimes et infimes espoirs des Dolphins s’évanouissent dans le fog qui, lentement, tombe sur le Stanford Stadium. Plus aucun point ne sera inscrit. Côté Miami, les Killer Bees s’amusent enfin un peu. Mais la tête n’y est pas. Évidemment. Déjà battus, les Floridiens font de leur mieux pour ne pas creuser un peu plus leur tombe. Elle est déjà bien assez profonde comme ça. 537 yards de profondeur. Jamais une formation n’en a concédé autant depuis le Super Bowl XI. Jamais formation n’en a conquis autant. Gueules d’enterrement d’un côté, ambiance de mariage de l’autre. Bill Walsh peut se déhancher sur le bord du terrain et faire admirer ses talents de danseur. La victoire est totale. Incontestable. Incontestée. Si ce n’est par les veines plaintes de Lyle Blackwood, toujours irrité par la décision des arbitres d’invalider son fumble. Pourtant, ses coéquipiers ne sont pas dupes. Son coach non plus.
« Nous avons été dominés à un point tel qu’une seule action n’aurait pas changé grand-chose, » concèdera amèrement Don Shula. »Les 49ers étaient clairement meilleurs que nous. […] C’est dur à admettre. »
2-4. Don Shula rejoint Bud Grant dans le clubs très fermés des coachs à avoir perdu 4 Super Bowls. Les deux meilleurs équipes, les deux meilleurs quarterbacks, deux coachs de génie. Les promesses d’un duel épique, disputé, serré, endiablé. Au lieu de ça, une dérouillée comme le Super Bowl en a trop souvent offert. Un carnage digne des pêcheurs japonais. Les Dauphins n’avaient aucune chance. Trop dépendants d’un Dan Marino pris à la gorge, écrabouillés par des 49ers roublards, plus complets, versatiles, sans véritable faiblesse et portés par un Joe Montana qu’ils n’auront jamais su dompter. 331 yards records, 3 touchdowns dans les airs, 59 yards au sol, plus du double des dolphins (25), et un touchdown de plus. Jamais passeur n’aura autant éclaboussé un Super Bowl de sa classe.
« Notre objectif numéro un était de contenir Joe Montana et nous l’avons fait de façon vraiment, vraiment épouvantable, » lâchera le coach défensif Chuck Studley.
Au terme d’une saison qui les aura vu décrocher 18 succès records, les hommes de Bill Walsh sont sur le toit du monde. Chez eux. Car après tout, on n’est jamais aussi bien que chez soi.