S’ils brillent chaque dimanche, leurs parcours pour atteindre le firmament que représente la NFL sont souvent inconnus du grand public. La rédaction de TDActu vous propose de les découvrir avec cette série consacrée aux acteurs du football américain.
Alvin Kamara
1m78 pour 97 kilos
Né le 25 juillet 1995 à Norcross, Georgie
Running-back, New Orleans Saints
Sélectionné pour le Pro-Bowl dès sa première saison, Alvin Kamara est un joueur majeur d’une des meilleures équipes de la ligue. Spectaculaire et efficace il a su dépasser ses doutes et quelques préjugés pour devenir un joueur majeur en NFL.
Talentueux
Sa dernière année au lycée de Norcross, il court pour 2264 yards et marque 26 touchdowns (+ 5 TDs en réception) et il est nommé Mr Football Georgia. Il est bien entendu invité au Under Armour All American game (match All Star des lycéens) et il y joue avec entres-autres Christian Hackenberg (ex Jets), Keanu Neal (Falcons) et celui qui deviendra plus tard son coéquipier Alex Anzalone, battant 16 à 3, l’équipe de Joey Bosa (Chargers), Laquon Treadwell (Vikings) et Yannick Ngakoue (Jaguars). Keith Maloof, son entraineur rapporte à theadvocate :
« On voyait qu’il était spécial car il courait intérieur ou extérieur, il attrapait également les passes. J’adaptais mon plan de jeu pour lui, j’adorai le mettre en duel face aux linebackers adverses, fatal pour eux. Il nous a conduit à un bilan de 15-0 »
Il est alors courtisé par les universités les plus prestigieuses en terme de football et en 2013, il choisit de jouer pour celle de Alabama. Il arrive sur le campus de Tuscaloosa en même temps que Derrick Henry (Titans), Rueben Foster (49ers), Jo Allen (Redskins) et OJ.Howard (Bucs). Mais en aout 2013 il se blesse au ménisque et avant même que la saison ne débute, la sienne est déjà terminée.
Perturbé
4 ans plus tard il confie à Ben Baskin de sportsillustrated que cette blessure, la première de sa vie, lui a fait perdre les pédales et multiplier les mauvais choix : d’abord rester enfermé dans sa chambre sans répondre aux appels des entraineurs et coéquipiers, se montrer rebelle ensuite à la discipline imposée par le coach Nick Saban lorsqu’il revient à l’entrainement. Il quitte d’ailleurs le campus en cours d’année pour retourner chez sa mère, à Atlanta, et ne sait pas de quoi son avenir sera fait.
Il y est même arrêté pour conduite sans permis valable (permis de conduite accompagné). Policiers et détenus du jour se demandent tous ce qu’il fait là, lui la star du lycée que tous reconnaissent dans cette ville. C’est la seconde fois en quelques mois qu’il est interpellé. La première l’a été en compagnie de quelques coéquipiers de Alabama, avec qui, armés de pistolets à air-comprimé, il sème le trouble sur le campus tirant sur des feux de signalisations ainsi que sur un livreur de pizza. Il s’en tire avec 3000$ d’amende.
« What’s next ? » lui demande alors sa mère lorsqu’elle vient le chercher au milieu de la nuit dans ce commissariat. La suite, Alvin la voit sur les terrains et pas n’importe lesquels : ceux de la conférence SEC (South Eastern Conference)
Tenace
Mais l’université de Alabama ne l’autorise pas à être transféré dans une fac de la conférence. Où il veut mais pas en SEC. Il ressent qu’il a « quelque chose à prouver », notamment aux fans d’Alabama l’écorchant sur twitter.
« je me suis dis OK vous pensez que je n’ai pas le niveau pour jouer en SEC ? Je serai de retour l’an prochain »
Il décline alors toutes les offres provenant d’autres conférences et s’engage dans un Community College du Kansas. Un an plus tard, après avoir remporté le trophée de joueur offensif de l’année de ce niveau, il est libre de signer où bon lui semble et il rejoint une fac de la conférence SEC, l’université de Tennessee.
Cependant tout ne se passe pas comme il l’aurait espéré avec les Volonteers. Kamara joue mais il est le remplaçant de Jalen Hurd*. Ce dernier est un coureur puissant de 1m93 et en 2015 il porte le ballon 170 fois de plus qu’Alvin. Il signe tout de même 7 touchdowns et capte aussi les passes de Joshua Dobbs (Steelers) en étant le 2e receveur de l’équipe (en réception). *(Hurd est transféré à l’issue de la saison 2016 et joue aujourd’hui avec Baylor en tant que coureur et receveur)
L’année suivante il bénéficie d’un titulaire gêné par des blessures pour augmenter son temps de jeu. Son caractère, lui, est loué dès le départ par le staff qui en fait un des quatre capitaines de l’équipe en 2016. Sa saison est remarquée par les managers NFL mais lorsqu’il retrouve Alabama au mois d’octobre, il score un touchdown dans le 2e quart-temps avant de se blesser au genou. Il rate alors un mois de compétition.
Polyvalent
Il fait à nouveau sensation au NFL Combine d’Indianapolis, premier sur les sauts en hauteur et en longueur (départ arrêté) parmi les coureurs. Plusieurs entraineurs se rendent à Knoxville pour son Pro-Day et un en particulier s’y montre impressionné. Sean Payton l’invite donc à la Nouvelle-Orléans pour une séance privée. Il est testé sur certains types de tracés spécifiques et face au phénomène, Sean Payton sait déjà comment il veut l’utiliser : une position de joker, à savoir un joueur multi-taches.
Le coach avait déjà utilisé un joker dans son attaque, Reggie Bush puis Darren Sproles, et Kamara remplit ce rôle à merveille : 1901 yards (tout compris) et 14 touchdowns, avec en prime un titre honorifique de débutant de l’année. Quelle aubaine, un joueur choisi au 3e tour seulement, 66 joueurs choisis avant lui dont 5 coureurs. D’aucuns parlent d’un physique trop frêle pour supporter les défenses NFL, pour expliquer une sélection aussi loin dans la draft. Alvin avance lui un autre facteur :
« Au combine lors des entretiens, certains m’ont demandé si je pouvais me couper les cheveux ? Si je pouvais retirer l’anneau de mon nez ? Car certains entraineurs n’aiment pas ça disaient-ils » (B/R)
Pourtant, lors de ce même NFL Combine, Alvin obtient la meilleure note parmi les coureurs au test de QI, le wonderlic test. Mais, avant de percevoir l’intelligence d’une personne, certains ont du mal à tout d’abord dépasser leurs propres préjugés.
La suite vous la connaissait. Après une seule saison dans la grande ligue, il est rookie offensif de l’année, il joue le Pro-Bowl et ses pairs le classent 20e lors du vote pour le NFL top 100. Cette nuit au commissariat semble bien loin. Néanmoins une chose n’a pas changé : lui.
Authentique
« Il est le même. La preuve c’est que je suis toujours là » dit en riant son ami depuis leurs onze ans, l’artiste DJ Tonee (qui travaille notamment avec 6lack). Et alors que la plupart de ses coéquipiers habitent des résidences privées, Kamara lui, loge dans un appartement en plein centre-ville. Il connait bien ces rues festives et son goût pour la nourriture y est très souvent satisfait. Décontracté, il est simple d’accès aux habitants d’une ville qui l’a adopté. Il n’est pas rare, de le croiser entre le quartier Français et le stade, vu qu’il en revient, le plus souvent, à pieds !
Alvin Kamara walks from The Dome to his downtown apartment after games so that he can interact with the fans. I love this guy. #ROTY #WhoDat https://t.co/U5VNTAyiqd
— Wicker Perlis (@WickerPerlis) January 4, 2018
Il rencontre ainsi les fans, discute, prend des photos. Il s’arrête pour manger aussi, des ailes de poulets frits et, les soirs d’après match victorieux, il boit quelques verres de sa boisson préférée : La mule de Moscou.
Natif de la ville, l’acteur Anthony Mackie (Avengers), est un grand fan du joueur :
« Ce gars est le meilleur Avenger de l’équipe ! Quand je dois jouer le rôle du Faucon, je pense que je suis Alvin Kamara »(si.com)
Populaire, il est fréquent de voir en tribunes, des fans arborant de fausses dread-locks ou un anneau dans le nez, en hommage à leur joueur favori et ils ne sont pas les seuls. Mark Ingram lui, s’équipe d’un protège-dents rappelant la (fausse) dentition dorée de son coéquipier :
Une prothèse dentaire amovible (gold grill) qu’Alvin utilisait à l’université de Tennessee déjà, alliant ainsi swag et protection.
Instinctif
Inter-saison 2018, sur le campus de Florida Atlantic, il travaille en compagnie de Jimmy Graham (Packers), Teez Tabor (Lions) et d’Antonio Callaway (Browns). Et alors que le rookie de Cleveland est en train de vomir un peu plus loin, Jimmy Graham confie à BleacherReport :
« Il est très fort mentalement et positif aussi, toujours à encourager les autres. ça fait du bien de voir cela chez quelqu’un d’aussi jeune »
Et le cornerback de Detroit, qui l’a affronté avec Florida, de rajouter :
« Ce n’est qu’une fois que tu essayes pour de vrai de le plaquer que tu comprends ! »
Il se décrit lui-même comme une personne faisant confiance à son instinct (« je tiens cela de ma mère et de son côté Africain ») et, il compte laisser ni la célébrité ni l’argent, changer sa personnalité. Répondant à la question du journaliste Master Tesfatsion (B/R) :
« Les gens me perçoivent comme ils veulent. Parfois je ne me comprends pas non plus alors je ne vais pas chercher à ce que les autres comprennent. Et puis, je m’en fiche. Leur avis n’est que leur avis, et je suis qui je suis, point »
Ses amis sont les mêmes qu’il y a une petite dizaine d’années. Les mêmes avec qui il a connu des jours moins joyeux. Comme le rappeur Quavo du collectif Migos. L’oncle d’Alvin, connu sous le pseudo Coach K, en est d’ailleurs le producteur. Connus ou anonymes, le même cercle de fidèles l’entoure encore aujourd’hui.
Quel aurait été son avenir s’il n’avait pas connu de blessure à Alabama ? Quel Alvin serait-il si Adama, sa mère, n’avait pas quitté le Liberia en 1989 ? Sentant le climat politique se dégrader, elle décide de partir avec Garmai (sœur ainé d’Alvin), quelques mois plus tard éclate une guerre civile qui durera 7 années. Personne ne peut savoir ce qu’il serait devenu. Alors il est. Il est Alvin Kamara, un jeune homme simple, aimant la vie et ce qu’elle a à offrir.